prendre le temps de boire son café

Dernière mise à jour le 6 juin 2025

Dans notre monde moderne, il n’y a pas que les objets qui s’accumulent : nous sommes aussi bombardé·es de sollicitations et d’informations. S’inscrire dans des clubs, participer à des événements, sortir régulièrement, s’engager dans mille projets, conserver une vie sociale à la hauteur… tout ça semble une bonne idée sur le moment, mais au final, on se retrouve avec un agenda hyper encombré et l’impression de courir tout le temps. Pour retrouver du temps, et de l’énergie, faisons le tri dans nos obligations et engagements !

C’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité, je l’avoue d’emblée : je suis la première à ressentir le besoin de me lancer dans plusieurs chantiers en parallèle, j’ai toujours été " dispersée " et j’ai souffert de FOMO* une bonne partie de ma vie. Cependant, je me soigne, car j’ai compris que courir partout et vouloir tout faire, c’était me précipiter vers l’épuisement.

C’est grâce à ma grande expérience d’hyperactive qui se soigne que je peux te livrer quelques conseils pour alléger ton agenda, te recentrer sur ce qui est vraiment important pour toi et retrouver ce fichu temps (et de l’argent et de l’énergie tant qu’à faire !).

(* "Fear Of Missing Out " : la peur de manquer un événement ou un stage, une occasion qui ne se présenterait plus, ou d’être mise à l’écart si je n’acceptais pas toutes les invitations que je recevais)

Choisir c’est renoncer… Quand tu dis oui, à quoi dis-tu non en retour ?

Bombardé·es par des opportunités, des invitations, des annonces d’événements, d’ateliers ou de cours, nous n’arrivons plus à sélectionner à tête reposée. Il faut se dépêcher de s’inscrire car les places sont limitées, on reçoit des invitations à des événements sur les réseaux sociaux, on a du mal à dire non parce qu’on a du mal voir ses proches " assez souvent ", et on ne veut pas manquer une soirée ou un workshop au cas où l’opportunité ne se représenterait plus jamais…

Le temps de la réflexion

Première tactique : ne jamais s’engager directement. Si tu vois passer un événement qui te semble intéressant, ou que tu reçois une invitation, prends le temps de consulter ton agenda et de te demander si tu as le temps, l’argent et l’énergie nécessaires.

S’il s’agit d’un événement que tu as vu passer, sauvegarde-le et vois si tu y penses encore après quelques jours. S’il s’agit d’une invitation directe d’un·e proche ou ami·e, dis-leur que tu donneras ta réponse dans deux ou trois jours car tu dois vérifier ton agenda. Et n’aie pas peur de manquer quelque chose ou de froisser quelqu’un : les événements ne manquent pas, et si on t’en veut pour si peu, c’est qu’il faut remettre en question tes relations…

Avoir le temps et l’énergie, ça ne veut pas juste dire " ne rien avoir de prévu à ce moment-là ". Prends en compte les choses prévues les jours ou semaines avant et après, ton état de fatigue général pour le moment, et tes propres capacités.

De plus, certain·es ont besoin de récupérer après chaque interaction sociale, tandis que d’autres sont au contraire revigorés par ces interactions : c’est important de te connaître et de ne pas essayer de suivre tes ami·es, proches ou collègues à tout prix, et de ne pas te laisser faire quand on te met la pression.

Certaines personnes sont capables de sortir tous les weekends et n’en ressentent aucun effet, d’autres ont besoin de limiter les sorties à maximum un weekend par mois, certaines personnes n’ont aucun problème à pratiquer des activités hebdomadaires plusieurs fois par semaine, d’autres en ressortiront plus épuisées que satisfaites…

De plus, cette capacité évolue avec le temps ! Ce n’est pas parce que je sortais plusieurs fois par semaine quand j’avais la vingtaine que j’en ai encore la capacité, ni même l’envie d’ailleurs ! On peut également traverser une période où on a plus de défis à gérer et où notre buget-énergie est plus limité que d’habitude, ou avoir besoin de plus de temps seul·e pour récupérer.

Le budget-temps

Deuxièmement, commence à gérer ton temps comme tu gèrerais un budget. Malheureusement, nous ne disposons pas de temps et d’énergie, pas plus que d’argent, en quantités illimitées. Il faut accepter que nous avons des limites dans le présent et qu’il faut composer avec elles.

Il est aussi important de garder du temps pour soi, du temps qui n’est alloué à aucune activité : nous avons besoin de ces périodes à ne " rien faire ", ce sont les moments qui permettent à notre cerveau de traiter l’information, les moments où on développe notre esprit créatif et où on récupère.

Prends du recul avant de te lancer dans un projet ou de t’engager dans une nouvelle activité. Chaque chose que tu commences t’empêche d’en faire d’autres : choisir, c’est renoncer. Cela ne veut pas dire que tu ne dois plus rien faire, mais je t’encourage à prendre le temps nécessaire pour réfléchir avant de décider.

Dès que tu envisages de débuter quelque chose (un projet pro ou perso, un loisir, une activité bénévole, ou tout simplement accepter une invitation à un événement ou t’engager à donner un coup de main), prends le temps de dresser un bilan :

  • Qu’as-tu à gagner en te lançant, qu’est-ce que ça va t’apporter de positif ?
  • Qu’as-tu à perdre, à quelles autres activités renonces-tu (pssst : prendre du temps pour soi, seul·e, pour se reposer, c’est aussi une activité, et elle devrait rentrer dans ton budget temps !), quelles contraintes cette activité va-t-elle engranger ?
  • As-tu vraiment le temps et l’énergie nécessaires, comment te sens-tu de manière générale pour l’instant, est-ce que ton agenda est suffisamment dégagé au moment de l’événement… ?
  • Pourquoi veux-tu te lancer, t’y sens-tu obligé·e, es)tu influencé·e par quelqu’un… en gros, tes raisons sont-elles bonnes, le choix est-il le tien ?

Cela ne veut pas dire que tu vas refuser de donner un coup de main pour le déménager de tes ami·es à tout jamais, mais que tu seras capable de décider si tu en as la possibilité, au moment où on te sollicite. Prendre une journée pour aider quelqu’un quand tu arrives à gérer tes propres priorités, que tu te sens bien et que tu as un agenda assez dégagé, ce n’est pas pareil que dédier une journée à cela quand tu es noyé·e, que tu es tout le temps fatigué·e, ou que tu as un gros événement qui arrive dans la même période !

Sortir avec des amis, c’est dire non à des heures de sommeil et sacrifier une partie de son budget pour les boissons. S’inscrire dans un club, se lancer dans une activité, c’est donner du temps et de l’argent régulièrement. Est-ce que tout ça rentre dans tes budgets ?

Notre temps nous appartient

Il y a quelques années, j’avais tendance à suivre une amie dans toutes les sorties qu’elle proposait, même quand ça ne me bottait pas spécialement. J’ai un type d’attachement plutôt fusionnel, et j’aimais passer du temps avec elle. Seulement, voilà, pendant les sorties qu’on faisait ensemble, je me suis rendu compte que je ne prenais pas du bon temps, puisque je suivais juste mon amie dans ce qui lui plaisait, à elle.

Pire, quand j’ai essayé de reprendre le contrôle et de proposer des sorties qui me plaisaient, à moi, elle ne m’a pas rendu la pareille. C’est comme ça que je me suis rendu compte que notre amitié ne tenait à rien et qu’elle ne me faisait pas du bien.

J’ai vécu quelque chose de similaire avec une autre personne. Avec le temps, c’était devenu de plus en plus difficile de se voir en tête-à-tête, alors que je ne me sens pas à l’aise en groupe (surtout quand il s’agit de la bande d’ami·es de quelqu’un d’autre). Je me retrouvais à des fêtes ou autres événements avec tout un tas de personne avec qui je n’avais pas d’atômes crochus, et quasiment incapable de discuter à cause du décalage entre moi et toutes ces personnes (que je n’avais pas choisi de fréquenter) et de mon malaise dans les grands groupes.

Quand j’ai réalisé que c’était devenu impossible d’obtenir du temps en petit comité avec mon amie, j’ai compris que notre amitié avait atteint ses limites. Quelque part, j’imagine que moi, je ne rentrais plus dans son budget-temps à elle ! Je parle plus longuement du tri dans les relations dans mon article sur le désencombrement mental.

Ce genre de situation n’est pas strictement limité à des relations amicales : on peut s’être engagé·e dans une activité bénévole (comité des parents d’élèves, travail dans une association…) et se rendre compte que ça ne nous convient plus ou qu’on n’arrive plus à suivre, suivre des cours de danse, de chant, de guitare, de dessin… et soudainement perdre l’intérêt pour cette discipline, avoir pratiqué un sport pendant la moitié de sa vie et avoir envie d’autre chose, ou se sentir lessivé·e chaque semaine au moment de s’y rendre…

C’est difficile d’arrêter toutes ces choses, soit parce qu’on y a investi beaucoup de temps et d’énergie, et qu’on a peur de " gâcher " ces années, ou parce qu’on doit faire part de notre décision à d’autres personnes et qu’on ne veut pas les décevoir.

Cependant, c’est normal de changer, c’est normal de ne pas avoir les mêmes envies, les mêmes capacités, la même motivation… au cours de notre vie. Ton temps t’appartient, alors même si la décision est difficile à prendre, il est de ta responsabilité de la prendre, ou de continuer à subir quelque chose qui ne te convient pas.

Les années que tu as passées à pratiquer l’une ou l’autre activité ne sont pas gâchées parce que tu arrêtes l’activité en question : tout ce que nous faisons nous apporte de l’expérience et nous permet de mieux nous connaître, de savoir ce qui nous convient ou pas, et toutes les compétences qu’on acquiert sont transférables. L’important, c’est que ces activités t’aient procuré des choses positives pendant que tu les pratiquais. Dès que ce n’est plus le cas, il ne faut pas hésiter à tourner la page.

Un outil pour faire le tri dans ses activités et projets

Souviens-toi d’une chose importante : tout comme on ne peut pas posséder toutes les choses qui nous plaisent (sinon… on se retrouve encombré·e et fauché·e !), on ne peut pas se lancer dans TOUT ce qui nous intéresse.

A chaque fois que tu envisages quelque chose, note-le, laisse passer un peu de temps. Cela te permet d’une part, de ne pas garder l’idée " activement " en tête (= esprit moins encombré), et d’autre part, de constater si le besoin/l’envie persiste ou s’étiole.

Ma matrice pour faire le tri dans ses projets

Avec un TDAH et un esprit très créatif, les nouvelles envies d’activités et de projets toutes les semaines, ça me connaît ! L’épuisement mental (ou burnout) aussi ! J’ai donc développé des techniques pour me recentrer et mieux choisir mes activités et projets.

Je me suis créé un tableau qui me permet de faire le tri, de prioriser, ou tout simplement d’accepter d’abandonner un projet pour de bon. Par exemple, j’avais écrit un roman il y a quelques années. Le manuscrit n’avait été accepté par aucune maison d’édition, mais j’ai eu du mal à l’abandonner et je m’y suis accrochée pendant des années.

Du coup, quasiment une fois par an, je ressortais ce fantôme du passé, je repassais des jours à le relire, me remettre dans le bain, essayer de trouver comment l’améliorer pour pouvoir le publier. Je l’ai réécris plusieurs fois, mais il n’est toujours pas publié. Pourtant, j’ai toujours d’autres projets en tête, qui m’amuseraient beaucoup plus. Pour être transparente, je me sentais obligée d’en faire quelque chose à cause du temps investi dans le premier jet.

Grâce à ma matrice, j’ai pu me rendre compte que, concrètement, je n’avais en fait aucune envie ni motivation à bosser dessus, que je m’imposais cette tâche pour des raisons obscures, et j’ai pu sereinement décider d’arrêter d’y passer du temps. À tout jamais.

J’utilise une notation faite de signes + et -. Si un projet est plein de -, c’est que je dois probablement le laisser tomber. Dans le cas contraire, c’est sûrement un bon investissement de mon temps. La colonne ROI (revenu sur investissement) n’est pas à prendre seulement dans un sens commercial ou économique : c’est aussi le bien-être, l’épanouissement, ou tout autre bénéfice que ça peut t’apporter.

Donc par exemple, dans mon cas, ça donnait ça (j’avais d’autres projets dans ma liste, mais j’en ai juste sélectionné deux pour l’exemple). Tu peux créer ta propre matrice avec les critères qui sont importants pour toi, et même créer quelque chose de similaire pour décider d’accepter ou non des activités, invitations ou autres engagements.

Avoir un outil concret sous la main permet de prendre des décisions plus facilement. Quand on a envie de " tout faire " et de dire oui à tout, c’est parce qu’on a du mal à prendre en compte tous les critères et qu’on est gouverné·e par l’émotionel et parfois l’impulsivité. Ces outils permettent de ne pas se laisser influencer (ni par soi-même, ni par les autres).

Ne rien faire, c’est perdre son temps ?

Quand on pense " perte de temps ", on pense également à ces moments à ne rien faire de " productif ". Regarder des séries, faire de l’art pour son propre plaisir (pas pour les réseaux sociaux ou en espérant le vendre), lire, jardiner, errer, jouer… ou même glander dans son canapé avec un plaid et un chat, qui n’a jamais culpabilisé en faisant ce genre de choses ? Pourtant, la course à la productivité et à la rentabilisation du temps nous épuise.

Fais la part des choses : quand tu pratiques ces activités " inutiles ", est-ce que tu le fais au détriment de quelque chose que tu as vraiment envie ou besoin de faire. Au contraire, est-ce que ces moments off te permettent de te recharger pour mieux repartir ? Surtout, est-ce que tu fais ces choses pour ton plaisir et ton bien-être, ou est-ce un mauvais réflexe que tu as pris et qui casse ton rythme ?

Il n’y a rien de mal à suivre une série qui te fais du bien, lire des blogs que tu aimes ou regarder des vidéos intéressantes, faire une sieste dimanche après-midi, écouter de la musique en profitant du confort de ton fauteuil préféré, au contraire, on a besoin de ces moments. Si par contre tu te perds souvent dans les méandres du catalogue Netflix et finis par te forcer à terminer une énième série qui te plaît moyennement, que tu passes souvent une heure, ou deux, ou trois… à rafraîchir tes fils d’actualité pour revisionner encore et encore la même chose sur les réseaux sociaux, c’est loin d’être bénéfique.

Le casanier est le mal aimé de la société de consommation : les siestes, les rêveries, les déambulations en pyjama ne s’achètent pas et ne se vendent pas.

Psychologies hors-série, S1, avril 2019

Résumé des grandes idées de cet article

  • On dispose toustes d’une quantité limitée de temps, d’argent et d’énergie : il est de notre responsabilité de les dépenser d’une manière qui nous satisfait.
  • On peut arrêter à tout moment une activité, même si cela fait des années qu’on s’y adonne. Nos besoins évoluent avec le temps et il ne faut pas voir ça comme un investissement gâché.
  • On a le droit de refuser les invitations, nos proches ne devraient pas se vexer pour autant. (Et s’ils se vexent, tant pis pour eux…)
  • Si tu as du mal à dire non, demande un délai de réflexion (prétexte par exemple que tu dois vérifier ton agenda).
  • Dans tous les cas, donne toi quelques jours de réflexion avant de t’engager.
  • Il est nécessaire d’avoir du temps libre, " à ne rien faire ", dans notre budget-temps.
  • Fais le tri dans tes engagement en te demandant ce que ça t’apporte, à quoi tu dis non, et qu’est-ce qui t’a poussé·e à t’engager.
  • Si c’est compliqué de faire des choix, utilise une matrice ou un autre outil concret.

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