Le slow sex, c’est le principe de reprendre le temps, de ralentir, et d’être ancré·e et présent·e dans sa sexualité. A l’écoute de soi et de l’autre (ou des autres, petit·e coquin·e). Si on a perdu (ou jamais eu) l’habitude de prendre son temps pendant le sexe, il existe quelques astuces pour changer ça.

Ancrage et pleine conscience

Pour profiter du moment, il faut y être pleinement. Ne pas penser à ce qu’il reste à faire dans la maison, à la grosse réunion du lendemain, à la grosse facture qui va bientôt tomber. On fait face ici à un cercle vertueux : si on s’ancre dans le moment présent, notre esprit divague beaucoup moins vers les choses qui nous accaparent au quotidien, et si on ne pense pas à tout ça, on s’ancre plus facilement dans l’instant présent. D’où l’intérêt aussi de prendre son temps : ça permet de faire une coupure nette entre le train-train quotidien et les soucis, et les moments d’intimité.

L’ancrage et la pleine conscience, ça s’apprend et ça s’entraîne jusqu’à devenir plus naturel. On peut commencer avec des méditations guidées sur la pleine conscience, même à mesure de 5 ou 10 minutes par jour. S’entraîner régulièrement (c’est super efficace aussi quand on est stressé·e entre autres). Seul·e ou avec son ou sa partenaire, si c’est un challenge pour tous les deux. Il existe probablement des méditations guidées sur la sexualité en pleine conscience sur ton application préférée.

Dans leur livre “Le Slow Sex : Faire l’amour en pleine conscience” (dont je parle à la fin de cet article), les auteurs conseillent de ne pas se perdre dans ses fantasmes pendant l’acte, mais de capter tout ce qui se passe pendant le moment d’intimité. Pour cela, ils conseillent de garder les yeux ouverts entre autres.

Pratiquer le sexe en pleine conscience, c’est aussi se rendre compte plus vite que quelque chose ne va pas pour nous (j’ai mal, est-ce qu’on va trop vite, trop fort ? je ne me sens pas à l’aise, est-ce que je suis ok avec cette pratique ?).

Arrêter la course à l’orgasme

Se focaliser sur l’orgasme, cela signifie aussi ne pas profiter du moment présent, de chaque instant de la relation, mais aussi souvent essayer expédier le rapport sexuel pour atteindre un point culminant mais de courte durée.

Cela vaut pour soi, et pour l’autre. Il est important de se concentrer sur son ressenti avant de chercher à tout prix à satisfaire l’autre, et surtout sur ce que l’autre voudrait que l’on fasse.

La course à l’orgasme peut devenir une source de stress, de tension et de complexe, avec parfois l’impression qu’il faut absolument jouir vite, jouir comme dans les films porno, faire jouir, faire jouir vite, faire jouir comme dans les films porno… A se focaliser là-dessus, on finit déçu·e si on n’atteint pas l’orgasme, ou qu’il n’est pas à la hauteur de nos attentes.

📑 Article : Le “sex positive” est-il devenu la nouvelle injonction à la mode ?

Faire l’amour dans la détente et la relaxation permet d’être plus proche de ses sentiments, de ses émotions, d’être dans l’affection et la souplesse, là où l’était d’excitation provoque une sexualité plus brute, ferme et fermée, voire expéditive et égoïste.

Ne pas se focaliser sur son apparence

Lorsqu’on est concentré·e sur son apparence, on perd de l’énergie à essayer de paraître à son avantage, jouer un rôle de séduction, et on se déconnecte alors de ses sensations intérieures, de ses émotions, pour se focaliser sur du superficiel. Trouve quelqu’un avec qui tu es suffisamment à l’aise dans ton corps pour ne pas devoir faire de la figuration esthétique*.

Les médias nous montrent souvent une sensualité extérieure, superficielle, formatée, avec des codes qui définissent ce qui devrait être excitant, emprunte de surenchère, matière à la compétition, porteuse d’une forme de violence envers les femmes et personnes sexisées.

Le slow sex invite à se focaliser plutôt sur les sensations internes, le ressenti, la complicité, sans avoir d’attentes, sans chercher à s’exciter activement l’un·e l’autre avec des artifices cosmétiques.

* Cependant, si tu n’en es pas à ce stade, c’est tout à fait ok de porter des vêtements, de se glisser sous les draps ou de tamiser la lumière, si c’est justement ce qui te permet de te libérer !

Ne pas suivre le menu entrée-plat-dessert

Le sexe semble fourni avec une recette toute faite. Bah oui, c’est la même qu’on voit partout. Même dans des productions qui se veulent sex positive, comme Sex Education sur Netflix, le sexe est quasiment toujours présenté de la même manière : une pénétration qui amène à l’orgasme des deux partenaires en 37 secondes. Certes, même un film de 3h pourrait difficilement inclure une scène de sexe réaliste de 40 minutes, mais on pourrait au moins nous suggérer autre chose.

Dans le mouvement slow sex, c’est aussi ce qu’on prône : approcher le rapport sexuel avec une attitude naïve, sans rien en attendre, sans programme, en se laissant guider, en accueillant la découverte, selon l’inspiration du moment.

Se donner du temps

Pour pouvoir ralentir pendant l’acte, il faut avoir du temps à sa disposition : si on s’y met juste après avoir lancé le rôti et que dans 30 minutes exactement il faut être prêt·e à servir le souper à toute la famille, on n’est pas dans les meilleures conditions !

Pour pouvoir faire l’amour à son rythme, ne pas penser à autre chose, il faut se réserver quelques heures* pour ça, un moment où on ne sera dérangé·e par rien ni personne.

* Comme d’habitude, je n’aime pas écrire des règles chiffrées, car chacun·e est différent·e, mais bon tu vois l’idée… vaut mieux avoir du temps en rab quoi.

Ouais mais comment on fait le slow sex ?

Il n’existe pas de recette, pas plus dans le sexe slow que dans toute autre pratique du sexe (à part ce qui devrait être évident, genre consentement etc.). Cependant voici quelques clés pour tester :

  • toucher l’autre, en étant attentif·ve (pas de manière mécanique et pour atteindre un objectif, ça pourrait être perçu par l’autre et c’est plutôt désagréable), ne pas hésiter à faire des pauses pour ne pas engourdir l’autre, faire des caresses légères, revenir au moment présent quand ça devient trop automatique, toucher sans intention, juste pour le plaisir que ça procure de toucher l’autre,
  • essayer des mouvements moins amples, moins rapides, moins crispés, observer les sensations plutôt qu’essayer de provoquer l’excitation et l’orgasme, faire des pauses statiques, faire des mouvements ronds et doux, les premières fois, exagérer le ralentissement, bouger millimètre par millimètre et se concentrer sur le ressenti,
  • communiquer verbalement, dire explicitement ce qu’on ressent, sans avoir peur du jugement de l’autre, sans but, juste pour que l’autre sache ce qui nous arrive, et surtout verbaliser immédiatement une douleur ou un inconfort, partager ses sensations positives pour qu’elles puissent résonner chez l’autre,
  • regarder l’autre, essayer de ne pas fermer les yeux, ne pas se perdre dans ses pensées et dans l’imaginaire, maintenir la conscience du moment présent,
  • respirer lentement et profondément, utiliser la respiration pour s’ancrer si on dérive, sentir l’odeur de l’autre, éviter les parfums pour pouvoir percevoir les odeurs naturelles,
  • laisser derrière soi toutes les idées préconçues et habitudes qu’on a, toutes les représentations des médias, pour aborder les rapports sexuels avec l’esprit ouvert,
  • si propriétaire de pénis dans l’histoire, ne pas chercher absolument à maintenir une érection continue, ne pas voir l’érection comme une nécessité d’aller à la pénétration ou d’être stimulé,
  • réserver des moments pour le sexe, couper avec le quotidien si nécessaire (ex : prendre une douche, faire une séance de méditation guidée, prendre un verre et papoter dans une ambiance feutrée…).

Une conclusion et une notre sur le livre “Le Slow Sex: Faire l’amour en pleine conscience”

Pour rédiger cet article, j’ai lu entre autres le livre “Le Slow Sex: S’aimer en pleine conscience” de Anne Descombes et Jean-François-Descombes. J’en ai noté quelques idées avec lesquelles je suis plutôt alignée.

Cependant, globalement, le livre m’a laissé une impression mitigée. Il a une vision de la division des sexes qui n’est pas du tout raccord avec ma vision du féminisme, et surtout il ne présente qu’une sexualité au sein du couple matrimonial et hétérosexuel. Il aborde entre autres une vision du féminin et du masculin qui auraient des polarités propres et complémentaires, des histoires d’énergies qui circulent lors de la pénétration pénis-vagin… Je n’adhère pas à ce genre de courant de pensée. Le livre parle aussi de tantrisme (une version bien particulière du slow sex qui ne convient pas à toustes). Il tourne étonnamment beaucoup autour de la notion de pénétration, qui reste selon la vision des auteurs “le” sexe.

En ressortant quelques grandes idées de ce livre (et d’autres articles lus en complément) dans cet article, j’espère que chacun·e pourra retrouver des idées à mettre en place. Il est important aussi de souligner que aucun courant, aussi positif qu’il paraisse, ne devrait devenir une injonction bienveillante. C’est ok de ne pas réussir à s’ancrer, c’est ok d’aller plus vite parfois, c’est ok certains jours de ne pas arriver à se focaliser sur autre chose que l’orgasme de son ou sa partenaire au détriment de ses propres sensations.

On peut pratiquer le slow sex avec un coup d’un soir comme avec une relation de longue date. Et seul·e ! On peut s’y mettre, arrêter, y revenir. C’est même possible que ça ne te convienne pas, ou même (je l’espère !) que tu trouveras ta propre définition et ta propre recette.

L’idée, c’est de s’écouter, d’écouter l’autre, de respecter tout le monde, de tester des choses, de s’amuser, de ne pas être en compétition au lit. L’idée, c’est de se sentir bien et d’être aligné·e.

Sur ce, bonne bourre !

Lectures Slow sex

📙 Le slow sex, s’aimer en pleine conscience (tantrisme, hétérosexualité, new age)

📙 Jouissance club, une cartographie du plaisir (idées pour s’amuser autrement que par la pénétration pénis-vagin, pour toustes)

📙 Sortir du trou, lever la tête : et échapper à notre vision étriquée du sexe, et inventer un nouveau répertoire érotique (essai sur la sexualité classique qui se résume souvent à la pénétration et à la violence envers les femmes, et comment l’améliorer)

📙 Au-delà de la pénétration (essai d’un homme sur la découverte de la sexualité… au-delà de la pénétration

Lire ensuite : Erotiser l’homme, dénormaliser la femme sexy

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